Don : The Chase Begins Again
Traduction : Don : la traque recommence
Langue | Hindi |
Genres | Polar, Film de gangsters |
Dir. Photo | K. U. Mohanan |
Acteurs | Shah Rukh Khan, Priyanka Chopra, Arjun Rampal, Om Puri, Boman Irani, Kareena Kapoor, Isha Koppikar |
Dir. Musical | Shankar-Ehsaan-Loy |
Parolier | Javed Akhtar |
Chanteurs | Sunidhi Chauhan, Udit Narayan, Sonu Nigam, Shah Rukh Khan, Shaan, Shankar Mahadevan, Mahalakshmi Iyer, Farhan Akhtar |
Producteurs | Farhan Akhtar, Ritesh Sidhwani |
Durée | 167 mn |
L’histoire : Don (Shah Rukh Khan) est un des leaders d’un grand réseau international de trafic de drogue. Il opère d’une main de fer, éliminant impitoyablement les traîtres et les gêneurs sur son passage. Mais lors d’un deal qui tourne mal, Don est grièvement blessé. Ayant réussi à le neutraliser, le commissaire DCP D’Silva a l’idée de le remplacer par son sosie Vijay, totalement inoffensif, pour faire tomber le réseau. Roma, la sœur de Ramesh, froidement abattu par Don, ignore ce subterfuge et se fait engager par Don, bien décidée à le supprimer à la première occasion.
L’avis de Suraj : 8/10
Ce serait un euphémisme de dire que Don, le nouveau film de Farhan Akhtar (Dil Chahta Hai, Lakshya), était très attendu. En effet, non content d’avoir Shahrukh Khan à son casting, c’est aussi le remake de Don, l’un des films les plus cultes de la légende Amitabh Bachchan.
SRK, la plus grande star actuelle interprétant l’un des rôles les plus fameux de la plus grande star du cinéma indien de tous les temps, il y a de quoi s’impatienter. Et ce d’autant que Don, plus qu’un personnage, est devenu avec le temps une véritable Icône du cinéma indien, synonyme de l’âge d’or des années 70, et d’Amitabh dans toute sa splendeur.
On aurait tôt fait de crier au sacrilège si Farhan Akhtar n’était pas le fils de Javed Akhtar, le Javed du duo Salime-Javed auteur du scénario du Donoriginel. C’est un gage de légitimité, d’autant qu’il a coécrit le remake avec son père.
La première partie est fidèle à la trame générale de Don. Mais passée l’intermission le film prend une direction complètement nouvelle : il actionne la surmultipliée. Encore plus spectaculaire, imprévisible, bourré de suspens, c’est de loin la meilleure partie du film. Elle tient en haleine au fil de rebondissements tous plus surprenants, jusqu’à un final énorme qui fera revoir tout le film pour constater à quel point le scénario est beaucoup plus intelligent qu’un simple remake.
L’ensemble est très cohérent, on retrouve la rigueur scénaristique des précédents films d’Akhtar. Il essaye d’apporter au maximum sa touche personnelle à cette version. On sent l’amour qu’il portait au film originel, qui explique cette première partie très fidèle, mais c’est dans la seconde qu’il est le plus brillant : à mesure que le film avance il prend ses distances, et brode autour des personnages et de l’univers de Don, ce qui donne au final un résultat inédit, et jouissif.
L’original était une petite merveille de divertissement d’action, porté par le truculent personnage de Vijay, dans un style funky très Blaxploitation.
Farhan Akhtar a conservé l’essentiel de ce qui faisait Don, les grandes lignes, et notamment ce thème de l’échange des identités, mais il le pousse encore plus loin.
Don 2006 est une version actualisée et les changements sont à la hauteur de ceux opérés entre l’Inde de 1978 et celle de 2006 : rapidité, mondialisation, confusion des valeurs et recherche effrénée du profit. Des changements qui valent aussi pour Bollywood, qui devient de plus en plus sombre. Ici, on ne sait jamais vraiment qui sont les bons et qui sont les méchants.
Si cette nouvelle version est tout aussi divertissante, elle l’est au regard des standards Hollywoodiens et HK, auquel le public est désormais habitué même en Inde.
Elle est aussi plus malsaine, plus ambiguë que l’original. C’est la première fois dans un film indien populaire que le héros est à ce point négatif (si on excepte Mission Kashmir, pionnier en la matière, où c’était un terroriste). Le temps des héros parfaits semble bel et bien compromis, le côté obscur de la force fascine plus que jamais.
Il est aussi plus international : la majeure partie de l’action se déroule hors de l’Inde, en Malaisie ou même (pour de vrai !) à Paris. Le film est cette fois porté par le personnage du Don, qui prend nettement le dessus sur tous les autres, justifiant du même coup beaucoup mieux le titre du film.
La mise en scène des séquences d’action est spectaculaire et particulièrement soignée. L’aspect technique du film est irréprochable, que ce soit dans les cascades, poursuites en voitures, explosions, le tout est remarquablement réalisé. Il ne souffrirait pas de la comparaison avec un des meilleurs James Bond. A l’image de sa séquence d’ouverture classieuse et énergique réalisée à Paris, le film démarre sur les chapeaux de roue et ne baisse jamais vraiment de rythme. C’est aussi ce qui fait sa réussite, Farhan Akhtar et son monteur ont réussi à donner au film le timing et le rythme nécessaires afin de tenir en haleine le public dès la séquence d’ouverture. Il jalonne le film de séquences d’action motorisées (course de voitures dans des bidonvilles) ou non (chute libre depuis un avion), et de combats divers savamment orchestrés dont on regrettera seulement qu’ils ne soient pas plus originaux dans les échanges (Ong-Bak cela devient lassant à force).
Du côté des interprétations, c’est de bout en bout un Shah Rukh Khan Show. Il est efficace en Don, avec un visage dur et inflexible. Son charisme fait une nouvelle fois merveille dans un rôle comme celui-ci, mais beaucoup moins dans celui de Vijay. Il est peu crédible dans ce personnage de chanteur de rue, mais compense par son enthousiasme. Boman Hirani en DCP D’Silva livre une interprétation énorme, ses faces à faces avec Shah Rukh Khan sont des moments d’une rare intensité. Boman Hirani avec un rôle ambigu comme il les aime est absolument parfait. C’est probablement l’un des meilleurs rôles de sa carrière, et l’un des premiers à la mesure de son immense talent. Son personnage a été considérablement rallongé et complexifié par rapport au film d’origine où il mourait très vite. Priyanka Chopra par contre est une déception. Elle paraît presque transparente à coté d’un Shah Rukh Khan qui dévore l’écran.
Les chansons sont aussi bien intégrées, ce qui n’est pas le moindre des mérites pour un film d’action actuel. On se rappelle de l’excellent Khakee, où les chansons inutiles ralentissaient le film. Ici elles auraient été dispensables, mais passent plutôt bien. On retiendra la mise en scène de Main Hoon Don, plus lancinante et électro que l’originale, elle est redoutablement efficace. Aaj Ki Rhaat est l’autre chanson à retenir, parce qu’elle s’intègre très bien, mais aussi pour sa chorégraphie au millimètre qui culmine en un plan séquence alternant les groupes de danseurs avec virtuosité, dans une style disco seventies probablement hommage au premier Don. Enfin la chanson de présentation du personnage de Vijay, est une composition originale : Maurya Re se situe pendant la fête du Dieu Ganesh à Mumbai, et présente Vijay comme un chanteur de rue spécialisé dans les chansons religieuses. C’est la seule chanson filmée en Inde même, elle comporte des prises de vues réelles du festival. Riche en couleurs, chorégraphiée avec énergie, c’est un des meilleurs moments du film et aussi tout ce qu’on retiendra du personnage de Vijay et de l’aspect ‘indien’ du film.
De la BO d’origine sont restées également Yeh Mera Dil et Kaike Paan Banaraswala. Ces deux célèbres morceaux du film d’origine ajoutent à la filiation, à l’hommage, mais auraient été dispensables - ce qui aurait accentué l’identité propre de ce film ci. La première est justifiée dans la narration, mais la chorégraphie qui tente de moderniser celle de Helen tient plus de la gymnastique que de la danse de séduction. De même pour la seconde, amusante mais pas forcement utile. Musicalement le mélange général entre chant traditionnel et beat techno est assez bizarre, mais la mise en scène amusante, et le fait que ça soit l’un des rares moments où Priyanka joue bien, en sauve l’intérêt.
En somme vous l’aurez compris Don version 2006 est une réussite. Polar d’action énergique porté un Shah Rukh Khan plus charismatique que jamais, la réalisation inspirée et le scénario malin de Farhan Aktar, il se démarque radicalement de son lourd héritage tout en revendiquant la filiation. Farhan Aktar a réussi le pari de donner au film une identité propre. Don version 2006 est tellement différent qu’on en oublierait qu’il s’agit d’un remake… et qu’on se prendrait même à imaginer une suite.
Rien que sur le principe il est déjà novateur puisque c’est un remake. Bollywood a depuis longtemps pris l’habitude de remaker à tour de bras les films fait dans d’autres langues (y compris indienne) mais c’est la première fois qu’il s’attaque officiellement a un classique de son propre patrimoine.
La réussite artistique de l’entreprise et son gros succès commercial, pourraient augurer d’une nouvelle tendance en Inde, à l’image de ce qui se passe déjà à Hollywood.
L’avis de Maya : 8/10
Don, le premier mot prononcé, avant même le générique. Don, comme une balle qui part et atteint sa cible. Dès la première scène, le ton est donné : Don est un polar, et son héros un vrai méchant qui élimine sans scrupule ceux qui ne lui sont pas soumis, se méfie de tous, déjoue les trahisons et sème ses poursuivants. « Don ko pakarna muskil hi nahi, namumkin hai » (attraper Don n’est pas seulement difficile, c’est impossible) est sa phrase préférée, elle vous flanque la chair de poule à chaque fois, grâce au talent inégalé de Shah Rukh Khan à jouer les tueurs limite psychopathes. Oublié le fiancé idéal des comédies romantiques ; dans Don, même quand il cherche à plaire il est inquiétant.
Farhan Akhtar démontre ici un talent certain pour le film d’action, avec un rythme soutenu, des plans courts, une bonne capacité à créer des tensions, une atmosphère de violence même s’il y a peu de bagarres et de sang, comme cette porte d’ascenseur qui s’ouvre et se referme plusieurs fois en butant sur un corps sans vie que l’on devine plus qu’on ne le voit ; le bruit de la porte sur le corps est particulièrement efficace… Sans être ni spécialiste ni particulièrement fan du genre, j’ai adoré les différents rebondissements de Don et ses retournements jubilatoires, de ceux qui vous donnent envie de revoir le film immédiatement pour déceler les moments où on aurait pu deviner que …
Shah Rukh Khan est excellent, il dégage une sorte de cruauté qui arrive à surprendre, tout en restant extrêmement séduisant (ouf, ça nous change de KANK…), ce film ravira ses fans et pourrait bien lui rapporter un Award. L’autre personnage fort du film, c’est Boman Irani, un DCP D’Silva plus vrai que nature, dont la stature s’impose dès les premières images. La crédibilité de toute l’histoire repose tout autant sur son interprétation que sur celle de Don. Il est à la fois très humain et très flic, débonnaire et rassurant mais sachant aussi se montrer inquiétant. Il est le liant, le « deus ex machina » par qui tout arrive. Deuxième Award ?!
Priyanka est sculpturale et ravissante mais très lisse, on ne sent en elle ni colère ni dégoût, dommage. Pour sa défense, Zeenat Aman en 78 a bénéficié de quelques scènes avec son « coach » où elle pouvait montrer sa rage, scènes qui manquent probablement à Priyanka pour affirmer son personnage. Kareena Kapoor est parfaite dans son rôle (hélas très court) de fiancée de Ramesh, tour à tour désespérée et vengeresse, son numéro de séduction en met plein les yeux, et pourtant là, on sent le dégoût. Les scènes avec Arjun Rampal sont à mon sens inutilement développées, mais il faut reconnaître qu’il joue avec justesse ce doux père de famille que rien ne prédisposait à devenir voleur et meurtrier en puissance.
La musique ne m’avait pas vraiment séduite avant d’avoir vu le film, mais elle est bien adaptée à l’ambiance générale, notamment la musique de fond pendant les scènes d’action, qui en renforce l’impact. La chorégraphie n’est pas très élaborée mais les clips sont plutôt sympathiques, ceux que j’ai préférés sont issus de Don 78 : Yeh Mera Dil dont la mélodie se retient facilement, le mégalomaniaque Main Hoon Don et le déjanté Khai ke paan banaraswala.
Don n’est pas un remake au sens strict, Don est plutôt le fils de Don : en 30 ans le monde a changé, le réseau de la pègre est devenu international, les truands machiavéliques, les jeux de dupes se sont multipliés. En revoyant Don 78 après avoir vu le plus récent, on trouve le plus ancien sympathique, bienveillant, simple, plus bagarreur mais moins violent, car moins tourmenté, moins sombre… moins mégalo aussi !
L’interprétation d’Amitabh et celle de Shah Rukh sont totalement différentes, à l’image des deux films, ce qui est tout à leur honneur… mais tous les deux ont un charme fou, impossible de les départager sur ce plan.
Don, dans ses deux versions, est un très bon divertissement. La version 2006 est bien représentative des courants actuels, elle a su tirer parti du film de 78, mais en trouvant sa propre tonalité, sa voie. Don était déjà un film incontournable, il le devient encore plus avec cet étrange et fascinant jeu de miroirs.