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Mission Kashmir


Bande originale

Bumbro
Chupke Se Sun
Rind Posh Maal
Socho Ke Jheelon Ka
Maaf Karo
So Ja Chanda
Dhuan Dhuan

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La critique de Fantastikindia

Par Ananda - le 24 mai 2004

Note :
(9/10)

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La question du Cachemire : voilà le terrain pour le moins glissant sur lequel s’engage le réalisateur Vidhu Vinod Chopra. Étant donné l’importance du sujet pour le pays, et ce, depuis la partition entre l’Inde et le Pakistan, patriotisme et manœuvres militaires pourraient être les ingrédients d’un film arborant un tel titre.

C’est ce que je pensais avant de commencer le visionnage et, fort heureusement, je faisais fausse route.

Ici, le parti pris est bien au contraire celui de la paix et de la réconciliation entre les religions. Le film illustre le mécanisme absurde mais très réel qui conduit à la haine et fait naître des terroristes qui n’ont rien à perdre. On peut vraiment parler d’un film à thèse. Mais rassurez-vous, cela ne rime pas avec ennui. C’est l’action qui est mise au premier plan, et les deux personnages principaux se chargent eux-mêmes, et avec vigueur, de la démonstration.

Les trois premiers quarts d’heure mettent en place le concours de circonstances qui constitue le point de départ de la haine et la naissance d’un terroriste.

Inayat Khan (Sanjay Dutt) est un inspecteur de la police indienne basée au Cachemire. Lors d’une opération commando contre un groupe terroriste, il ouvre le feu et décime involontairement - peut-être - toute une famille. Le jeune Altaaf se retrouve orphelin. Khan et sa femme Neelima, « Neelu » (Sonali Kulkarni), viennent de perdre leur fils Irfan à la suite d’un accident. À la demande de Neelu, les Khan adoptent Altaaf.

Cela commence plutôt bien. Altaaf accepte peu à peu ses nouveaux parents. Jusqu’au jour où, alors que les Khan sont sortis, Altaaf découvre la cagoule noire que Khan portait lors de l’opération. Altaaf fait immédiatement le lien : les yeux brillants et cruels perçant à travers une cagoule noire qui hantent ses nuits sont ceux du policier Khan.

Désormais, Altaaf n’aura plus en tête que la vengeance. On le retrouve des années plus tard (Hrithik Roshan) dans un groupe terroriste voué au djihad, pris sous l’aile de Hilal (Jackie Shroff), un moudjahidine, ancien de l’Afghanistan.

Altaaf est chargé de participer à une mission redoutable dans la région : la « mission Kashmir ».

Je n’en dis pas plus sur la mission elle-même, mais l’idée est vraiment bien vue et inattendue. Bien sûr, un affrontement final entre Altaaf et le policier Khan est inévitable. Suivant son issue, c’est une vision pessimiste ou optimiste qui l’emportera, mais je vous laisse le découvrir. Le suspens est très habilement maintenu jusqu’à la fin.

Ce qui fait en premier lieu l’intérêt de ce film, c’est sa profondeur et sa justesse dans la manière d’aborder les différents thèmes. On ne peut pas accuser le film de simplisme. La tolérance entre les religions est habilement suggérée tout au long, sans forcer le trait.

Le policier Khan est musulman, mais sa femme est hindoue. Le chef de Khan, un hindou, veut lui retirer la responsabilité de sécuriser la visite du premier ministre, mais Khan s’insurge et obtient gain de cause, car, bien que musulman, il est Indien et Cachemirien. Cela est nécessaire pour nuancer un film où les principaux accusés sont tout de même les terroristes islamistes, qui plus est, les seuls véritables « méchants » du film. Par ailleurs, à aucun moment le Pakistan n’est montré du doigt, et c’est heureux.

D’une manière récurrente, une symbolique et une rhétorique de paix colorent joliment le film. C’est le cas principalement dans les chansons comme Rind posh mal gindne drai lo lo qui célèbre la renaissance au moment du printemps.

La notion d’absurdité et de fatalité est également amenée. C’est Neelima qui, de ses propres mains, précipite la mort de son fils. Cela se voit aussi dans l’ambivalence du personnage de l’inspecteur Khan. Certes, il est là pour faire régner l’ordre, il a beaucoup d’humanité. Cela ne l’empêche pas de devenir parfois très violent, par exemple, lors de la fusillade au village. On retiendra ainsi la prestation de Sanjay Dutt (Khan), aussi à l’aise dans les scènes d’action où il se montre énergique que dans les passages émotionnels, ce qui lui permet de bien rendre cette ambivalence du personnage.

Hrithik Roshan s’en sort également plutôt bien, même si, pour exprimer les sentiments de colère et de vengeance, son expression a parfois tendance à beaucoup recourir à des tremblements. C’est néanmoins plutôt efficace et clair.

Ces personnages sont indissociables, et aucun des deux n’est le héros.

Les personnages féminins sont résolument dans le camp de la paix et de la sagesse. C’est leur amour qui peut guérir les haines. Sonali Kulkarni (Nileema), qu’on a vue également dans Dil Chahta Hai, parvient à donner de la profondeur à son rôle de mère. Il y a aussi Preity Zinta (également dans Dil Chahta Hai) dont le côté spontané et plutôt extraverti convient bien au rôle de Sufiya Parvez, une journaliste de la télévision du Cachemire.

À noter également les rôles des chefs terroristes au visage plutôt inquiétant. Jackie Shroff interprète le rôle de Hilal et, au début du film, Puru Rajkumar donne au personnage du terroriste Malik-Ul-Khan un visage au sourire sardonique et faussement affable, celui d’un vrai méchant.

Les ingrédients qui font le spectacle façon Bollywood ne sont pas oubliés, mais amenés d’une manière un peu plus sobre que d’habitude. Rien à voir avec Shakti - the Power, par exemple. La plupart des chansons s’intègrent vraiment dans l’action du film, et quelques-unes proposent un intermède plus marqué. Et on n’oublie pas de donner sa prestation au remarquable danseur Hrithik Roshan ! La musique (Shankar - Ehsaan - Loy) et les chorégraphies sont assez réussies, toutefois, un peu trop « retenues ». Elles ne parviennent pas à transmettre les émotions d’une manière aussi pleine que, par exemple, dans Lagaan.

Quelques traits fréquents dans les productions Bollywood sont aussi présents, comme la tendance aux coïncidences et aux changements de situation pas tout à fait réalistes. Par exemple, c’est avec une étonnante facilité qu’un terroriste remplace la valise de Khan par une autre, exactement identique, mais avec une bombe ! Il y a aussi de nombreux flash-backs : difficile de ne pas comprendre.

Le film profite d’un excellent niveau technique, à l’égal des productions internationales, américaines ou européennes. La photographie est sobre et équilibrée. Et pour créer le spectacle, les moyens sont là : effets pyrotechniques vraiment impressionnants, survol de quelques paysages du Cachemire qui se font rares dans les films.

C’est globalement bien fait. Peut-être abuse-t-on un peu trop des effets de saccade ralenti-accéléré à la Matrix lors des affrontements entre Hrithik Roshan et Sanjay Dutt, qui manquent un peu de réalisme et s’apparentent un peu plus à une chorégraphie qu’à un combat. Mais cela a quand même son efficacité.

En résumé, Mission Kashmir est un film qui parvient à délivrer un message de tolérance sans oublier le spectacle et l’action. Cette synthèse réussie en fait un incontournable de Bollywood, un de ces films qui a une âme et gagne à être vu plusieurs fois.

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