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Heroine


Bande originale

Halkat Jawani
Tujhpe Fida
Khwahishein
Saiyaan (Heroine)
Main Hoon Heroine

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La critique de Fantastikindia

Par Alineji - le 5 décembre 2015

Note :
(6/10)

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Depuis quelques années, à Bollywood, de nombreux films sont portés par les actrices. L’année 2014 a été celle de Maardani, Gulaab Gang, Mary Kom ou Queen. En 2012, il y avait déjà eu Kahaani avec Vidya Balan, et Heroine, un long métrage reposant entièrement sur les frêles et belles épaules de Kareena Kapoor. D’abord proposé à Aishwarya Ray qui, enceinte, n’a pu le tourner, le rôle principal a été confié à la future Madame Saif Ali Khan [1] qui avait décliné l’offre une première fois.

Heroine est le récit de la chute d’une star de cinéma, autant une chute morale que l’échec d’une carrière. L’histoire commence en pleine nuit au moment où une femme est poussée hors d’une voiture blanche. On la retrouve ensuite, le visage défait, au poste de police où elle veut déposer une plainte. Les policiers reconnaissent en elle la célèbre Mahi Arora (Kareena Kapoor), au moment où son fidèle secrétaire vient la chercher pour éviter le scandale. Un retour en arrière permet de comprendre comment on en est arrivé là. C’est son amant, Aryan (Arjun Rampal), une autre star passablement égocentrique, qui l’a éjectée après une énième scène, excédé par sa jalousie et par ses crises en public. La dernière ayant eu lieu lors d’une soirée où Mahi avait pris à partie la future ex-épouse d’Aryan — le couple est en instance de divorce mais préserve les apparences —, en lui renversant un verre de vin sur la tête.

Après sa rupture avec Aryan, profondément déprimée et seule, Mahi cherche à rebondir et engage une conseillère professionnelle, Palawi (Divya Dutta), chargée de redorer son image. Elle tourne des publicités, retrouve rapidement la une des magazines, mais plus difficilement le chemin des studios. Elle commence aussi une relation avec Angad Paul (Randeep Hooda), jeune joueur de cricket en pleine ascension. Alors qu’il est profondément épris de Mahi, cette dernière l’utilise pour sa carrière et le manipule. Elle finit par rejeter sa demande en mariage, ce qui provoque leur séparation. Rien ne l’arrête pour retrouver le chemin des plateaux et du succès, et elle ira très loin dans ce but. Trop loin. Seule la mort d’une ancienne actrice qu’elle révère, Shagufta Reza (très plaisant cameo d’Helen), la pousse à un retour sur elle-même et sur ce qu’elle a fait de sa vie. Que décidera-t-elle ? Quel sera le prix à payer ?

Conçu comme une plongée dans les eaux troubles de l’industrie cinématographique, dans ses bassesses et compromissions, Heroine aurait pu être un grand film. Une sorte de Sunset Boulevard ou de All about Eve à Bollywood et à la sauce indienne. Malheureusement, il ne tient pas ses promesses. Ses nombreuses qualités en font aussi paradoxalement ses faiblesses. Kareena a décrit son personnage comme une héroïne bipolaire et un rien schizophrène. Mais, si vous cherchez des clés, oubliez vite cette idée. Les modèles ont été multiples, de Madhubala à Marilyn, en passant par Ava Gardner et Liz Taylor. Le réalisateur Madhur Bhandarkar s’est fait une spécialité de la dénonciation des grosses institutions, les médias (Page 3), la mode (Fashion), les sociétés industrielles (Corporate). Peut-être fasciné par sa créature, il peine ici à faire partager les émotions de celle-ci, ni attachante, ni totalement détestable, et le spectateur est tenu à distance, réduit au rôle de simple voyeur. De ce fait, la fin arrive à point nommé, juste un peu avant l’ennui, et elle semble bien peu crédible au vu des quelques 2h et plus de 20 minutes qui ont précédé.

Kareena Kapoor n’y est pour rien. Dans un type de rôle qui exige souvent un jeu outré, la comédienne atteint des subtilités dont on ne l’aurait pas crue capable. Mais son personnage est moins fort, et finalement moins pur, que celui joué par Vidya Balan dans Dirty Picture, sorti un an avant sur un thème voisin. Hautaine, pourvue de faux-cils démesurés ou la mine défaite et les yeux cernés par les excès, elle est un vrai festival à elle seule. Elle démontre une fois de plus qu’elle est une grande, comme dans son interprétation de Rosie de Talaash, tourné la même année. En femme déterminée mais terriblement fragile, en amante délaissée comme en manipulatrice, elle joue avec maestria sur une large palette d’émotions, de sentiments et de looks successifs qui laissent pantois, et aurait mérité plusieurs prix d’interprétation.

Pour le look, rien que de très normal. Elle apparaît tantôt ultra glamour en égérie de mode ou lors des soirées dont raffole la planète cinéma, tantôt au naturel comme une jeune femme simple, tantôt ultra-vulgaire dans un rôle de prostituée censé la faire revenir au premier plan… Pour l’anecdote, sachez que cette débauche de tenues et de costumes, tous plus chers les uns que les autres, ont fait exploser le coût de la production. Les robes de Kareena Kapoor ont été dessinées par Manish Malhotra qui l’a déjà habillée à moult reprises depuis ses débuts à l’écran.

La performance de ses partenaires principaux est à la hauteur de celle de Kareena. Il fallait deux acteurs de grand calibre pour lui donner la réplique. Arjun Rampal en superstar à la personnalité complexe, dépassé par les événements, et lâche dès qu’il s’agit de sa carrière, est idéalement inexpressif. Randeep Hooda apporte une immense fraîcheur à son rôle de champion de cricket. Il est aussi crédible dans la peau d’un jeune sportif, innocent et amoureux, puis désabusé, que lorsqu’il joue les petits truands ambitieux, dans Saheb Biwi aur Gangster par exemple. C’est lui qui surplombe entièrement la scène de rupture entre Mahi et Angad. Son personnage, égaré dans ce milieu auquel il est étranger, est le seul réellement touchant d’Heroine.

A mettre au crédit du film encore, l’entourage proche de la star, très bien vu. De la conseillère sulfureuse, Divya Dutta, à la mère incarnée par Lillete Dubey qu’on aimerait voir dans de plus grands rôles, en passant par le fidèle secrétaire interprété par Govind Namdeo, tous ont le ton juste. Les rôles plus secondaires ne sont pas sacrifiés, bien que souvent plus caricaturaux. L’industrie de Bollywood n’est-elle donc composée que de pique-assiettes, langues de vipères, harceleurs, jaloux de tout poil et de tout sexe ? On sent que les scénaristes et le réalisateur connaissent le sujet de l’intérieur, mais ils s’y sont un peu égarés, au détriment de l’intrigue. Une narration plus resserrée aurait été plus percutante. On a l’impression soit qu’ils présentent un catalogue des perversions du milieu, soit qu’ils ont été tentés par le principe d’un film choral sans l’assumer.

Côté image, rien à redire. Le directeur photo, Mahesh Limaye, qui avait déjà œuvré sur Fashion et sur Dabbang, a su capter les moindres nuances du visage de Kareena, en diva inaccessible savamment maquillée et, à l’inverse, en femme ravagée par les excès de médicaments, d’alcool ou de malheur. Souvent à l’aide de gros plans. L’ennui vient de ce que l’alternance entre ces deux extrêmes, trop systématique, finit par irriter. Du côté de la musique, composée par le duo Salim-Suleiman, pas de problème. Les deux morceaux de choix, sont Main Hoon Heroine et surtout Halkat Jawani, chanté par Sunidhi Chauhan et spectaculairement chorégraphié pour un superbe numéro dansé de Kareena. On peut toutefois préférer les morceaux plus délicats comme Tujhpe Fida.

En conclusion, on regrette infiniment d’avoir à dire que si Heroine offre un vrai catalogue du talent d’actrice de Kareena Kapoor — la raison d’une note un tout petit peu supérieure à la moyenne —, il ne parvient pas souvent à émouvoir. C’est aussi un film tape-à-l’œil, une opportunité gâchée par une réalisation faussement audacieuse, en réalité trop démonstrative et incapable de dépasser les clichés sur le cinéma. Il laisse indéniablement le spectateur sur sa faim.



Bande-annonce


[1Les deux acteurs se sont mariés, environ un mois après la sortie du film

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