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4/ Salim Khan et Javed Akhtar : Le duo magique

Publié dimanche 27 janvier 2008
Dernière modification dimanche 27 janvier 2008
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Par Vidhan


Le scénario et les dialogues du film, tous cultes, furent écrits par le duo magique du cinéma indien : Salim Khan et Javed Akhtar. Ce dernier étant à l’heure actuelle le dialoguiste et parolier le plus demandé de Bollywood. Son fils Fahran Akhtar est devenu un jeune metteur en scène prometteur faisant désormais parti de la nouvelle génération en vogue de réalisateurs de films hindis. On lui doit, entre autre, Dil Chahta Hai et le remake de Don.
Le duo Salim-Javed est à l’origine du succès croissant d’Amithabh Bachchan et de son image de "Angry Young Man". Ils signèrent tous les dialogues des personnages interprétés par celui que les indiens surnomment, affectueusement, "the Big B".

Dans Sholay, son le style de jeu qui rappelle celui de Clint Eastwood dans sa période westerns spaghettis, remporte tous les suffrages : calme, silencieux et cynique. Le duo d’auteurs lui a écrit notamment une réplique, devenue culte. Il s’agit d’une question que Jai pose à Basanti sur un ton calme et légèrement sournois lorsqu’ils se rencontrent au début du film :

 « Tumhara naam kya hai Basanti ? (Comment t’appelles tu Basanti ?) »

Une autre savoureuse réplique fut écrite pour Bachchan, une messe basse que Jai adresse à Veeru et qui fait toujours rire les spectateurs indiens :

 « Saala nautanki, ghadi ghadi drama karta hai ! (Tu ferais un super bon acteur, espèce d’enfoiré !)

La verve de Salim Khan et Javed Akhtar, irrévérencieuse, totalement innovante pour l’époque et surtout très populaire, donne une véritable âme au film. Elle constitue la base humosristique de toutes les scènes comiques de Sholay.Le timing est parfait et les répliques font mouche à tous les coups.

On s’en rend compte surtout lors de la scène culte de tentative de suicide de Veeru. Cette scène, qui est en fait un monologue, est entièrement jouée par un Dharmendra démentiel faisant preuve de grandes qualités comiques. Une des répliques de ce monologue continue aujourd’hui de faire rire le public indien :

 « Wohi kar raha hoon bhaiya jo Majnu ne Laila ke liye kiya tha, Ranjha ne Heer ke liye tha, Romeo ne Juliet ke liye tha… suicide ! » (Je fais seulement ce que Majnu fit pour Laila, ce que Ranjha fit pour Heer, ce que Romeo fit pour Juliette… suicide !)

Un autre dialogue comique du film fut directement inspiré par la vie des auteurs. En effet, dans Sholay, le personnage de Jai tente d’obtenir avec une réticence flagrante, le consentement de la tante de Basanti pour qu’elle épouse Veeru.
Dans la vraie vie, à l’époque de l’écriture de ce dialogue Salim Khan avait accepté de négocier une demande en mariage auprès de la mère de la fiancée de son ami Javed Akhtar. Il le fit à contre cœur car il n’approuvait pas cette union. Cette anecdote véridique inspira les deux auteurs et amis pour écrire cette scène irrésistible.

Les répliques les plus fameuses, imaginés par Salim-Javed sont sans doute celles du cruel personnage de Gabbar Singh.
Tout le monde en Inde connait par exemple ces deux questions qu’il pose à trois de ses hommes avant de les exécuter.

 « Tera kiya hoga, Kaalya ? (Que va t’ il t’ arriver, Kaalya ?) »

 « Hmmm !… kitne aadmi tay ? (Hmmm !… Combien d’hommes étaient ils ?) »

Bien sûr ces deux répliques apparemment anodines n’ont rien d’extraordinaires en soi, mais replacées dans le contexte du film elles prennent une saveur toute particulière par le ton qu’utilise l’acteur Amjad Khan.

Javed Akhtar Bien qu’étant influencé principalement des 7 Mercenaires de John Sturges le scénario de Sholay un scénario original issu de l’imagination de Salim Khan et Javed Akhtar.
L’histoire du film se résumait initialement en quatre lignes qui furent peu à peu développées sur une longue période, influencées par des expériences de la vie. Les quatre lignes changèrent plusieurs fois de mains avant de former un scénario complet.
Au final, celui-ci mélange habilement trois intrigues :

 La Vengeance du Thakur

 L’histoire d’amour naissante entre Basanti et Veeru

 La seconde histoire d’amour naissante en entre Radha et Jai

Ce principe propre au cinéma Masala, permet d’alterner les scènes d’action et dramatiques avec les scènes comiques et romantiques ne laissant aucun temps mort au spectateur qui ne perd pas une miette de ce qu’il voit et entend.

Bien que le film aborde les thèmes bollywoodiens habituels de la fidélité en amitié et en amour, les valeurs familiales y sont presque inexistante. On ne connaît rien des origines familiales de Jai, Veeru, et Basanti. On sait juste qu’elle est orpheline et qu’elle vit avec sa tante. Habituellement cette absence de parents se retrouve chez les personnages de méchant. Or ici ce serait plutôt l’inverse. C’est une véritable innovation scénaristique à l’échelle des codes du cinéma indien.

Les deux auteurs enrichissent le scénario de Sholay en traitant des thèmes innovant touchant profondément la société indienne.
Le thème de la violence contre l’État illustre une prise de conscience croissante de l’autoritarisme. Il donne à cette époque un véritable coup de fouet au cinéma commercial indien plus habitué aux longues sagas mélodramatiques et moralisatrices.
Le thème de l’opposition entre le modernisme et la tradition est parfaitement illustré par une réplique de Basanti s’adressant à Veeru.
“ Tum shaherwale samajhte ho ke hum gaonwale ka akal hai nahin “ : (Vous les gens des villes, vous croyez que nous les paysans, nous n’avons pas de cerveau). Ce thème est omniprésent dans le film. Jai et Veeru ne sont pas originaires du village de Ramgarth où l’action se déroule principalement. Le village de Ramgarth est très respectueux des traditions comme tous les villages indiens, mais les 2 héros viennent de la grande ville. Pour les habitants de ce village ils représentent le changement, et le symbole d’un avenir joyeux et optimiste, mais aussi l’antithèse du traditionalisme.
La tante de Basanti refuse d’accorder la main de sa nièce à Veeru car à ses yeux, il n’est pas du tout un bon parti pour Basanti en raison de ses défauts, de son insolence, et de sa situation financière instable. Face à ce refus, Veeru ne capitule pas. Bien au contraire, il se rebelle ! Ce qui conduit à la fameuse scène comique de la tentative de suicide.

Dans les campagnes indiennes, les veuves sont toujours stigmatisées et complètement rejetées. Elles n’ont pas de statut et encore moins de droits. Jai ose briser cette règle en demandant au Takhur de laisser à Radha la possibilité de se remarier. Malheureusement le destin s’en mêle et empêche Radha de connaître le bonheur une seconde fois.
Dans Sholay, la fatalité, la nature, et le traditionalisme travaillent en équipe pour donner du fil à retordre aux personnages principaux.
Le film nous rappelle que la société indienne a ses propres règles et n’est pas préparée à laisser un personnage aux idées avant gardistes comme Jai, les briser. Il n’a pas le droit de se rebeller et de vivre heureux.
Le village de Ramgarh qui est un personnage en soi, est content d’accepter le bon côté du changement : ne plus être menacé par Gabhar Singh et sa bande. Par contre il ne supporte pas que l’on puisse toucher aux règles générales de la société. En d’autres termes le modernisme n’a pas sa place et n’a pas non plus droit de cité dans la campagne isolée. C’est aussi vrai pour Basanti qui a une attitude rebelle en travaillant en tant que « tanga wali », et qui admet d’ailleurs que son métier est totalement inhabituel pour une fille. Elle et Veeru qui sont obligés de quitter le village afin de vivre leur vie comme ils le souhaitent.

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